YA+K :
Arpenter

la ville en transformation
par le collectif


Le collectif YA+K a été créé il y a bientôt 12 ans par un groupe de jeunes architectes réunis par la volonté d’“agir” l’espace public, de l’agiter et de le secouer par l’intervention située. Notre rencontre au cours de l’organisation des festivals Bellastock avait révélé que faire dans l’espace — construire, faire la fête, “habiter” par l’architecture éphémère —, avec nos pairs, des acteurs extérieurs (concepteurs, habitants…)  permettait d’interroger les lieux et de faire exister des communautés d’action puissante. Le désir était alors d’aller au-delà de l’événementialisation de l’espace pour explorer les potentialités de ce type d’approches dans une autre manière de “fabriquer” la ville.

Celle-ci a évolué et s’est consolidée depuis 10 ans. Nous avons fait le constat que nos conditions de travail et de projet s'étaient formées au sein de brèches et d’opportunités que les transformations à l'œuvre dans les territoires métropolitains nous ouvraient. Voici quelques étapes effectives et réflexives qui ont constitué ce parcours d’arpenteur des transformations urbaines.

©Collectif Yaplusk

Préambule :
C’est quoi la ville en transformation ?
Séquences et interstices : les rythmes de la ville
Notre parcours fait apparaître un rapport aux différents moments, aux différentes séquences que peut connaître un quartier, un territoire.
Les rythmes de la ville intègrent des périodes de vacances, des situations de pause et de latence ; ce sont des temporalités suspendues pour lesquelles les processus lents seraient une réponse méthodologique quant à leur évolution (tiers-lieux, ferme urbaine, friche culturelle). Au contraire d’autres séquences se juxtaposent ; le temps du chantier, la mise en mouvement de la matière et la construction, le “faire”. Le chantier constitue un événement qui ponctue le rythme des villes, il désigne à la fois l’activité en elle-même de construction, mais également le site de production et l’aspect éphémère de ce moment.
Entre chacune de ces séquences se tissent pour nous un urbanisme dit ‘intermédiaire” qui créer les liens, des continuités entre état présent et projet. 
C’est en intégrant ces temps dans l’analyse et la compréhension du contexte que nous réagissons et faisons aussi évoluer notre pratique.
«Du fait de leur statut provisoire et incertain, les interstices laissent deviner ou entrevoir un autre processus de fabrication de la ville, ouvert et collaboratif, réactif et transversal. Ils nous rappellent que la société ne coïncide jamais parfaitement avec elle-même et que son développement laisse en arrière-plan nombre d’hypothèse non encore investies.»
Pascal Nicolas-Le Strat , Expérimentations politiques, chapitre « Multiplicité interstitielle ». Arpenter + loin.
La ville en mouvement, intégrer l’idée qu’il n’y a pas d’état permanent.
Cette influence pour la ville en mouvement, l’architecture mobile, éphémère nous vient des architectes futurologues, Archigram, Superstudio … ou des structures mobiles se dispersent et forment des villes. Les tentes, les montgolfières sont vectrices d’imaginaire et de projection sur le futur ; Les métropoles ne seraient alors plus constituées d’opérations globales mais d’une infinité de microstructures dont la présence sans cesse renouvelée et disséminée sur l’ensemble du territoire transformerait notre environnement.
Cette posture valorise le processus au profit du produit ou de l’objet architectural, le construire importe plus que le construit… Ce processus s’installe dans le temps avec l’idée de transformation progressives des espaces, de préfigurations successives et à l’écoute des usages immédiats.
« L’espace public existe par l'événement qui réunit une collectivité, par la surprise qui renouvelle la relation entre citoyen et ville. Ne retrouve-t-on pas plus d’espace public lorsque les quais sont brutalement suspendus de leur usage routier pour devenir une promenade ? Une expérience de «re-publicisation » qui nous réveille comme public et nous révèle comme communauté au présent. Mais on ne peut pas gagner la Coupe du monde tous les quinze jours... Entre exceptionnel (érotique diffuse) et l’ordinaire (passivité individualiste), on se demande ce qui reste « public » dans l’espace public ? Sera public l’espace qui accueille tous les publics ou l’évènement qui rassemble une communauté provisoire ? Ces questions sont celle d’aujourd’hui, car il y a une actualité de stratégies d’urbanisme temporaire, qui visent à reprofiler la ville par des évènements déclencheurs de nouvelles pratiques ... Il n’existe pas d’état permanent de l’espace public » 
Extrait de l’article de Marc Armengaud ; Voies Publiques - Histoire et pratiques de l’espace public à Paris, sous la direction de Simon Texier, 2006. Arpenter + loin.
Une opposition contestée entre architecture temporaire et “durabilité” du projet. 
Architecture et cycle de vie. 
Mettre en œuvre et revendiquer une architecture capable elle-même de se transformer, de se réinventer prend une tout autre ampleur avec l’urgence environnementale de préserver nos ressources.
Nous assistons dans notre quotidien métropolitain à une obsolescence planifiée du bâti; que ce soit dans la frénésie de construire des surfaces pas chères de logements ou de bureau ou dans l’incapacité à rénover notre héritage moderniste, l’architecture doit repenser son cycle de vie, elle doit proposer des systèmes pour se déconstruire, se réhabiliter, s’adapter.
De notre point de vue, l’architecture éphémère ne s’oppose pas à l’idée de durabilité, au contraire ; que ce soit par la préfiguration, par la modularité, par la réversibilité, par l’itération…c’est une recherche d’une proposition résolument durable qui minimise l’impact sur l’environnement (matériel et social).
« Ménager » le territoire plutôt que de l’aménager ; dans cette construction de paysage durable, nous déplaçons la seule expérience de la maîtrise d’œuvre vers des notions d’accompagnement, de gestion, de transmission.  

« L’époque précédente, dite moderne, était en effet empreinte des dogmes du Progrès (c’est peut-être sa caractéristique), et convaincue de leur universalité. L’architecte pouvait assurer, en traitant des programmes fonctionnels extrêmement structurés, orientés vers cet horizon de Progrès, assurer la maîtrise des situations (urbaniser, loger, éduquer, mettre au travail) par la production d'objets architecturaux.
Dans nos sociétés contemporaines, la programmation même de l’équipement, de l’habitat est devenue très incertaine, face à des défis que l’état des connaissances ne permet pas actuellement de résoudre, voire de cerner, face aussi à des mouvements sociétaux infiniment moins contrôlables. Est-il toujours question pour l’architecture de maîtriser l’espace, les normes sociales, l’économie urbaine , l’écologie urbaine… ? Ne serait-il pas plus pertinent d’entreprendre de transformer, d’amender, d’accompagner les transitions ? De chercher à révéler le potentiel d’une situation plutôt qu’à la maîtriser ?”
Extrait de « Construire avec l’immatériel, temps, usages, communautés, droit, climat…de nouvelles ressources pour l’architecture», sous la direction de Jana Revedin, édition Alternatives, 2018.
Les métropoles ne seraient alors plus constituées d’opérations globales mais d’une infinité de microstructures dont
la présence sans cesse renouvelée et disséminée sur l’ensemble du territoire transformerait notre environnement.




















« Ménager » le territoire plutôt que de l’aménager ; dans cette construction de paysage durable, nous déplaçons la seule expérience de la maîtrise d’œuvre vers des notions d’accompagnement, de gestion, de transmission. 




De OPUS pour Objet de Perturbation Urbaine et Sensitive en 2012, à Plateau d’été à Ivry-sur-Seine, à L’hyper-lieux de Bagnolet.
L’expérience YA+K, par là.
@Bruno Levy
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